Une thématique, un appel de texte lancé au grand public, des sélections, beaucoup de travail, et un an plus tard, les Laissés Pour Contes sont de retour sur les planches. L’ignorance, thème de cette quatrième édition, ne m’a franchement pas laissé de marbre. Présentée du 17 au 21 février au théâtre La Chapelle, la pièce fait du beau avec du simple.
Ca aurait pu se passer dans la cuisine, au café du coin, ou même chez mamie. Les Laissés Pour Contes jasent des moments très intimes de la vie avec son lot d’écorchures, de regrets, de moments de fougues, de sourires et de vécu qui pèse parfois bien trop lourd.
Comme l’oreille attentive d’un ami, le public se meut en recepteur privilégié des six monologues sur une scène très épurée. Parfois on aurait aimé enlacer les comédiens, embrasser les mots qu’ils utilisaient, les mots qui auraient pu être les nôtres. Un arrière goût de secret de famille et de sujet tabou nous rappellent, tout compte fait, que chaque anonyme a une histoire rocambolesque à conter.
Bien loin des codes classiques, des textes incompréhensibles et des mises en scènes lourdes, voir les Laissés Pour Contes c’est comme écouter l’un de nos proches se confier. Pas de prétention ni de tirade indéchiffrable, la beauté du quotidien en six récits.
On nous parlait d’ignorance cette année.
L’ignorance est multiple et dispose de ce super pouvoir émotionnel, celui de mettre un coup de projecteur sur nos vilaines et jolies faiblesses. Qui accepterait que l’on ignore ses désirs, ses rêves, son passé ou ses valeurs? Certains pleurent un enfant, ou ignorent encore tout de lui. D’autres font preuve d’ignorance face à la violence du mieux qu’ils peuvent et jouent à l’autruche. Leurs histoires font écho avec des affaires qui pourraient être celles des humains à côté de nous, la poésie en plus.
C’est cette proximité qui selon moi fait que le charme des Laissés Pour Contes opère. Le concept est finalement tout bête et tout méchant, mais il fallait y penser : ouvrir l’écriture au grand public, du comédien ultra-famous au plus néophyte d’entre nous.
Rallier des plumes à la cause des contes urbains.
On ne vient pas écouter les textes des plus grands dramaturges de l’histoire du théâtre avec des particules pompeuses tous les trois centimètres, non, on vient écouter des tranches de vie écrites par des personnes, tout ce qu’il y a de plus humaines et complexes. Pis c’est beau ça, de pas être parfait.
Partick Renaud, le metteur en scène de la pièce, me parlait des Laissés Pour Contes comme d’une « initiation au théâtre » et il est vrai que j’y emmènerais volontiers certains qui s’y intéressent peu d’habitude. Ce genre de théâtre qui flirte avec le vraisemblable a de quoi réconcilier les plus peureux.
Mon coup de cœur revient au monologue Rose Nanane dont les magnifiques mots ont été écrits par Pierre-Marc Drouin et inteprétés avec brio par Alphé Gagné.
On parle peu d’homophobie au théâtre, et surtout, lorsqu’on en jase sur la place publique, le jugement de valeur n’est jamais très loin. Rose Nanane place le spectateur face à la réalité de nos campagnes reculées : une fermeture d’esprit parfois cruelle qui fracasse des vies par pure bêtise et ignorance. Le monologue était vide de tout clichés et artifices que l’on se permet d’ajouter habituellement au sujet de l’homosexualité. Et ça m’a touché, qu’on ignore exprès les stéréotypes, mais qu’on aborde les vraies questions, quand même. A vrai dire on ne parlait même pas d’orientation sexuelle, on parlait juste de savoir vivre, d’ouverture d’esprit et de respect.
On me souffle dans l’oreille que le thème de l’édition 2017 est déjà tout trouvé. Voilà donc venu le moment d’oser prendre vos claviers, vos stylos plumes, vos crayons à la mine défraichie, de vous armer de toutes vos pensées et d’écrire ! D’accord, ça à l’air un peu dingue balancé comme ça, mais sait-on jamais.
Bien sur, dans ces moments là il faudra faire preuve de… courage. C’est pile le thème de la cinquième édition, ça tombe bien.
Plus d’informations sur le site des Laissés Pour Contes.
Crédit Jules Bédard
Théâtre La Chapelle
3700 Rue Saint Dominique
Copyright © Me Myself & Montreal. All rights reserved. Tous droits réservés.