Mérédith: la vie rêvée d’une névrosée

5 mars 2016
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Y’a pas que les comédies romantiques qui nous font rire en utilisant des figures féminines pour endosser le rôle du héros: le théâtre sait très bien faire ça, lui aussi. Puis à Montréal on ne manque pas de petits bijoux.

Du 23 février au 12 mars, Mérédith établit résidence dans la salle intime du théâtre Prospero. La production Théâtre Le Tartare nous offre un monologue maîtrisé à la perfection qui nous fait sourire, nous fait refléchir et nous fait du bien. Geneviève St Louis incarne avec justesse la vie rêvée d’une névrosée.

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©Sebastien Johnson

Control freak, tirée à quatre épingles dans son tailleur irréprochable, Mérédith semble tout droit sortie du cliché de la business woman rigide. Le chignon parfait et la diction plus que déterminée: la protagoniste impose directement le genre de respect que l’on a pour un professeur austère.

Mais qui ne tente pas de tout contrôler, ou du moins, s’imagine tout contrôler? On se reconnaît alors volontiers dans le rôle du bon petit soldat de sa propre vie: métro-boulot-dodo mode repeat, tout est sous contrôle, je répète, tout est sous contrôle. Mais Mérédith se dévoile attachante, sensible, solitaire et en mal d’amour. Elle tente alors d’élaborer des protocoles pour ne pas trop sombrer dans ses angoisses.

On sent comme du Boris Vian dans l’air dès le départ. Les mots sont bien choisis, c’est poétique, chimérique et cinglant à la fois. Qui pensait qu’une femme aussi ancrée dans le réel tomberait amoureuse d’une voix sortie de nulle part, et que son carrelage se transformerait en champ de tulipes ? Personne, je crois.

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©Sebastien Johnson

Très drôle et puissant, le texte de Marie-Christine Lavallée nous transporte dans un building froid et guindé… puis dans une jungle de sentiments la minute d’après. Mérédith préfère de loin tenir à l’écart les humains et rentrer chez elle rêver d’un prince charmant qui s’annonce plutôt déconcertant.

Non, non je ne vous spoilerais rien, ce serait bien trop dommage.

Une femme et une table sur scène, c’est tout. Je pensais voir sous mes yeux les tribulations d’une hystérique contrôlante, mais mes petits préjugés ont vite valdingués: Mérédith est hilarante et hors du commun. Une bonne heure de sourire garantie. Ca fait du bien au moral et aux zygomatiques.

Meredith2016 06 ©Sebastien Johnson (web)

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©Sebastien Johnson

Finalement les plus inquiets se verront rassurés: c’est correct de souhaiter le rationnel et de voir devenir son imaginaire plus fort que la réalité. C’est correct d’aller se cacher dans sa salle de bain parce que votre parton vous fait du gringue et que vos collègues féminines sont des pestes. C’est même conseillé de se perdre dans ses rêves, apparemment.

Mérédith c’est un peu la petite voix intérieure qu’on entend sans s’en rendre compte. Et ça vaut le coup, ne serait-ce que par curiosité, d’aller écouter cette petite voix, ma foi très éloquente.

Jusqu’au 12 mars au Théâtre Prospero.

Théâtre Prospero
theatreprospero.com
Page Facebook: @theatreprospero
1371, rue Ontario Est

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Claire-Marine

Electron libre à la fois humaniste, féministe et culture-junkie. Tu pourras me croiser en train de dévaliser une librairie, d'écrire dans un café, ou d'en prendre plein les yeux et les oreilles dans une galerie d'art, un théâtre ou un concert. Tout simplement, je fouille les évènements culturels montréalais à la recherche de toujours plus de poésie.

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